lundi 9 février 2015

Des cis et des trans


Des cis et des trans

Il y a une cinquantaine d’années, nous, les femmes, qui avions gagné le combat pour  l’obtention du droit de vote, affrontions de plein fouet l’organisation sociale responsable de notre infériorisation, ce monde où l’homme existe en soi : il est, et la femme, Madame ou Mademoiselle, n’existe qu’en fonction de lui – à savoir  le patriarcat. Après quelques années glorieuses, où s’est cristallisée notre conscience féministe et où s’est édifiée une solidarité qui dépassait les frontières nationales, le mouvement s’est peu à peu circonscrit, se concentrant sur la question du sexe, plus exactement sur la norme prévalente en matière de sexualité, à savoir  l’hétérosexualité.

Il fallait y arriver.

Et puis, on est allé bien plus loin. On a soutenu que, l’assignation sexuelle étant une construction sociale, on pouvait, et l’on devait au besoin, la détruire. D’ailleurs, pourquoi n’y aurait-il que deux sexes? se demande Anne Fausto-Sterling (Les cinq sexes : Pourquoi mâle et femelle ne suffisent pas, Payot, avril 2013). Et  voilà prôné le sexe à la carte, et voilà répartis  les êtres humains  en deux grandes catégories : ceux qui se sentent appartenir véritablement au sexe officiellement déclaré à leur naissance et donc à celui qu’affichent leur conformation externe et leur fonctionnement interne, hormonal principalement : les Cisgenres. Et ceux qui, en dépit du sexe mentionné par l’état civil, se sentent autres : les Transgenres. (Parmi ceux-ci, certains iront jusqu’à vouloir se transformer chirurgicalement, ce sont les transsexuels; leur cas n’est nullement concerné par mon propos, pas plus que ne l’est la question de l’orientation sexuelle, laquelle n’a rien à voir avec ce débat). Ainsi donc se trouve démasqué  le grand mythe de la biologie, cette biologie si longtemps respectée, pourtant menteuse, avare, même,  puisqu’elle limite sans vergogne les innombrables virtualités dont nous pouvons nous targuer. Bref, la reine est nue!  Telle est la  « révélation » qu’une petite poignée d’individus est actuellement en train d’arriver à imposer à une majorité ignorante et éberluée.

Il faut en sortir.

Qu’est-ce qui peut bien se passer dans la tête d’un homme1 qui dit « se sentir femme »? Il ne peut porter un enfant, il ne peut avoir de menstruations, il ne peut accoucher, il ne peut posséder de clitoris – cet organe merveilleux dont les hommes n’ont pas l’équivalent et qui n’a qu’une vocation : la jouissance. Un homme ne peut qu’emprunter le portrait impersonnel, l’idée toute faite de LA femme : cheveux longs, maquillage, robe (longue  de préférence), boucles d’oreille, talons hauts, etc., autrement dit, se rabattre sur un travestissement, plus, sur un portrait figé, en cours dans la société mais sans aucun lien avec une individue précise - bref, sur ce qu’on appelle un stéréotype. Et c’est là que réside le principal danger : la notion de transgenre conforte ces stéréotypes sexuels que, par le passé  nous, les femmes, avons  fortement combattus et dont nous avons fini par obtenir la suppression, notamment dans les manuels scolaires : « Papa travaille, maman s’occupe du ménage, de la cuisine et des enfants ».

Or, ce serait pour ces hommes l’occasion de justement les mettre à plat, ces stéréotypes, de s’habiller, de se parer, de se comporter « comme des femmes » tout en restant des hommes. Il n’y a, entre hommes et femmes, que d’infimes différences  psychologiques et comportementales inscrites véritablement dans notre organisme – encore que leur inventaire et leur retentissement sur la psyché  restent à préciser. Les femmes n’ont-elles pas pour la plupart fini par adopter une sorte de mode que l’on pourrait dire unisexe : pantalon, voire cravate, cheveux courts, etc. ? Pourquoi les hommes ne s’approprieraient-ils pas les signes  extérieurs de l’autre sexe sans pour autant se déclarer transgenres?

Car l’habit ne fait pas le moine… 
Andrée Yanacopoulo

1 Je ne parle que des hommes, car, pour le moment du moins, ce sont très majoritairement des hommes qui disent se sentir femmes. Encore un point à approfondir… « si la tendance se maintient ».

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